jeudi 8 mars 2007

Jour 35 : TANGER / SETE - La croisière du BILADI



Difficile de laisser ce beau Maroc du Nord-Ouest, ce Maroc de notre enfance, ce Maroc de la campagne et toute ses richesses... Avec my sweet Ginet (mon vtt, vous l'aurez compris), nous remontons toute la file de véhicules et nous embarquons vers 17 heures mardi 6 Mars à bord du "BILADI", littéralement "mon pays"... J'ai le temps de faire un grand tour de ce joli bateau... Pour une fois, je ne bosse pas à bord, je suis passager, je vais me laisser porter par l'accueil, et savourer une belle traversée de 36 heures jusqu'à Sète... Comme dit la pub : Voyager vers la France avec la COMARIT, c'est 36 heures de Maroc en plus...











A l'heure où les petits bateaux rentrent au port de Tanger, le fier BILADI s'apprête à appareiller pour Sète. Le voyage commence par ce mythique Détroit de Gibraltar. Il n'y a pas d'endroit maritime aussi fascinant que ce bras de mer qui sépare 2 continents, qui relie une mer et un océan... Une vie maritime intense... Combien de voyageurs ont franchi ce lieu fascinant... Devançant tous les anonymes qui l'empruntent aujourd'hui, un voyageur de légende, le plus grand voyageur arabe, IBN BATTUTA (1304-1377), presque contemporain de Marco Polo, né et mort à Tanger après une vie qui lui fit parcourir environ 120.000km vers l'Arabie, la Syrie, l'Irak, la Perse, l'Afrique Orientale, les Maldives, Malabar, Ceylan, la Chine, le Sahara, le Soudan... Il faut s'imaginer les moyens de transports de l'époque qui dissuadaient les rares voyageurs à aller au-delà du paysage quotidien et tout le mérite qui revient à ce voyageur-géographe. Quand Ibn Battuta rentre définitivement à Tanger à l'âge de 50 ans, il dicte ses souvenirs au secrétaire du Prince, Ibn El-Djozaï. Son ouvrage s'intitule : "Présent fait aux observateurs, traitant des curiosités offertes par les villes et des merveilles rencontrées dans les voyages", plus connu sous le nom de "Rihla", terme générique qui désigne les récits des voyageurs arabes. Oui Ibn Battuta est de la trempe des plus grands voyageurs...



En rouge, les voyages de Marco Polo, en vert, les voyages d'Ibn Battuta poussé par une motivation éblouissante... 

"Je sortis de Tanger, lieu de ma naissance, le jeudi 2 du mois de redjeb, le divin et l’unique, de l’année 725 [14 juin 1325],dans l’intention de faire le pèlerinage de La Mecque et de visiter le tombeau du Prophète. (Sur lui soient la meilleure lumière et le salut !) J’étais seul, sans compagnon avec qui je puisse vivre familièrement, sans caravane dont je pusse faire partie. Mais j’étais poussé par un esprit ferme dans ses résolutions, et le désir de visiter ces illustres sanctuaires était caché dans mon sein.
Je me déterminais donc à me séparer de mes amis des deux sexes, et j’abandonnais ma demeure comme les oiseaux abandonnent leur nid. Mon père et ma mère étaient encore en vie. Je me résignais douloureusement à me séparer d’eux, et ce fut pour moi comme pour eux, une cause de maladie. J’étais alors âgé de vingt-deux ans"











La nuit tombe sur le vieux Tanger, la belle cheminée jaune et bleue s'illumine... Il fait nuit quand le BILADI appareille...


Petit matin calme sur la Méditerranée... Un contre-bordier à tribord... On savoure la douceur de l'air et le confort du voyage...











































On se ressource en tendant les mains vers le sillage...



















Quand vous embarquez à bord du BILADI, le maître d'hôtel vous attribue une table pour tout le voyage : nous sommes 6 à la table 39, un marocain face à sa femme : il travaille en Suisse dans le bâtiment. Au milieu de la table, deux "baroudeurs" se font face, ils reviennent d'un périple de 5 semaines en 4x4 qui les a menés jusqu'au Bénin où ils ont vu lions et éléphants. La route est bitumée partout, Tan-Tan, Tarfaya, la Mauritanie... En face de moi, un autre marocain qui travaille dans le cosmétique... Ambiance sympa, conviviale, on a quelques histoires à se raconter, on évoque bien sûr "my sweet Ginet" qui sommeille dans l'ombre du garage fermé pendant la traversée...































Ma cabine est au pont 7, numéro 7211. Dans le hall, prendre 2 fois à droite...











Dans l'après-midi du 7 Mars, on croise un roulier qui fait route entre les Baléares et Alicante. Peu à peu, le vent passe du Sud au Sud-Ouest... Puis il fraîchit en passant à l'ouest à la force 5. Le BILADI gîte à peine et passe confortablement dans les creux d'1,5 à 2 mètres.




















Tandis que le soleil décline, un orchestre marocain nous offre au grand salon-avant une musique aux sonorités arabo-andalouses... Je savoure ces accents du sud en sirotant quelques thés à la menthe...



Au matin du 8, juste avant d'arriver à Sète, le vent a fraîchi d'une demi-force, un passager prend son envol dans la tramontane pour essayer d'arriver avant nous au port... Salut Icare...



Après mon petit-déjeuner à la table 39, je vais savourer mon dernier thé à la menthe dans le grand salon...



Après un beau voyage, on arrive à Sète avec une petite heure de retard... Le BILADI, c'est... 37 heures de Maroc en plus... La tramontane faiblit aux abords du port tout en restant décoiffante!!!



Le phare de Sète sur la grande digue du large...



On embouque le canal principal. Face au vent, c'est plus facile... A quai, le BRIGHTY STAR



On évite sur tribord dans le grand bassin et on y accoste babord à quai. Bravo pour la manoeuvre pilote et capitaine... Tout petit sur le quai, à l'angle des grilles, mon grand Seb est venu à ma rencontre... On a plein de choses à se raconter...















Tout est casé dans le coffre, sacoches, mallettes, roues, cadre, elle a tout d'une grande cette petite 205... On file sur le Haut-GardMaman et Guy nous attendent pour le repas de (midi) 14 heures... C'est bon d'être attendu quelque part après un long voyage...











On s'embrasse, on déjeune en partageant ce beau voyage. C'est un roman presque aussi riche qu' une page du "Rihla" d' Ibn Battouta...



En vidant mes sacoches, je trouve tout au fond ce citron que Maman m'avait donné le jour de mon départ de la maison le 1er Février. J'hésitais à le prendre pour ne pas m'alourdir, expliquant à Maman que c'était la saison des agrumes tant dans les huertas de Valencia et d'Alicante qu'au Maroc et que je n'avais pas vraiment besoin d'un citron dans mes bagages. Mais Maman a encore insisté,  je me suis laissé gagner par l'idée que ce brave citron avait valeur de talisman, et dès lors il n'a plus quitté mes bagages jusqu'à l'arrivée tout à l'heure chez moi à la case-départ... Il m'a probablement protégé des dangers de la route... Le voilà qui trône maintenant sur l'étagère principale de mon petit bureau. Salut précieux citron-voyageur... Les choses ont une âme, celle qu'on veut bien leur donner, tiède comme l'âme de nos chiens, douce comme nos âmes de voyageurs... Ce citron, Maman l'avait cueilli sur un citronnier qu'elle m'a offert il y a quelques années et que je lui ai confié voilà quelques mois, depuis qu'il n'y a plus personne pour s'occuper des plantes en pots dans mon jardin pendant mes absences maritimes. Il s'épanouit sous la main verte de Maman. Demain, je vous fais une photo de mon arbre dans sa pension dorée chez Maman, rien ne remplace les attentions d'une mère... Et puisque que tout en général finit en musique, voilà deux liens musicaux réservés aux mélomanes avertis pour clôturer ce beau voyage:

mon_vieux et de deux...

D'autres voyages ici : Captain Tiof


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